C’est le 20 août 1991, poussé par la tentative de coup d’état en URSS, que le parlement estonien proclame l’indépendance du pays. Cette indépendance va être obtenue sans violence.
Le choix du parlement s’est porté sur la restauration de la république d’Estonie, fondée en 1918 et reconnue par la communauté internationale, représentée en 1991 par un gouvernement en exil et des représentations diplomatiques, notamment à New York.
La route vers l’indépendance
Les gouvernements de Pays Baltes ont entamé leur processus d’accession à l’indépendance à la fin des années 1980. Le 16 novembre 1988, le gouvernement de la république soviétique d’Estonie publie sa Déclaration de Souveraineté. Elle établit que les lois du pays sont supérieures aux lois de l’Union Soviétique.
Cet acte fait écho à la Révolution chantante, un large mouvement à travers les pays baltes consistant à chanter des chansons patriotiques, et leurs hymnes nationales, alors interdites par les forces soviétiques.
Le 23 août 1989, pour les 50 ans du Pacte Molotov-Ribbentrop, qui établissait le partage des pays baltes, une chaîne humaine s’établit entre Tallin, capitale de l’Estonie et Vilnius, capitale de la Lituanie, en passant par Riga, capitale de la Lettonie. On estime qu’entre un et deux millions de personnes ont participé à cette chaîne, la Voie Balte, sur les 8 millions d’habitants des trois pays.
Pendant l’année 1989, plusieurs lois sont votées par le Soviet Suprême. Entre autre, l’estonien devient la langue officielle. Des comités citoyens s’établissent à travers le pays. Leur but premier est d’enregistrer les estoniens de souche, c’est à dire les citoyens de la république d’avant 1940 ou leurs descendants. Le second but est l’établissement d’un Congrès d’Estonie. Les élections au congrès se déroulent en février 1990, et le congrès se tient en mars.
Le 8 mai 1990, la république soviétique d’Estonie est renommée « République d’Estonie ». Le drapeau bleu-noir-blanc est rétabli, ainsi que plusieurs dispositions de la constitution de 1937. Un mouvement identique se produit en Lettonie et en Lituanie.
En réaction, l’URSS, le 11 janvier 1991, envahie les pays baltes. D’abord en Lituanie, où les chars entrent dans Vilnius et prennent plusieurs bâtiments, dont la tour de la télévision, prise le 13. En Lettonie, Riga est attaquée le 14 janvier. En Estonie, la population résiste pacifiquement, formant des boucliers humains et empêchent les chars d’atteindre les bâtiments gouvernementaux.
Le 3 mars 1991, un référendum se tient sur l’indépendance. 77,8% des votants confirment leur volonté d’accéder à l’indépendance. Ce pourcentage représente quasiment tous les estoniens, et 30% des non estoniens, issus de l’immigration russe.
La déclaration d’indépendance
A ce moment, l’Estonie fait toujours partie de l’Union Soviétique. La tentative de coup d’état contre Mikhail Gorbachev donne l’occasion à l’Estonie de terminer le processus. Le coup d’état commence le 19 août 1991. Une colonne de chars soviétiques se dirigent vers Tallinn.
Le 20 août, une réunion d’urgence du parlement prend une décision capitale : la restauration de la République d’Estonie, indépendante et souveraine. Pour comprendre le choix qui a été fait, il faut rappeler un fait : La république d’Estonie, établie en 1918, n’a pas cessé d’exister, jusqu’en 1991. En effet, l’occupation soviétique, pas plus que l’occupation allemande, n’a jamais été reconnue par la communauté internationale. Comme pour les républiques de Lettonie et de Lituanie, l’occupation est considérée comme illégale.
De 1940 à 1991, de nombreuses ambassades d’Estonie ont continué à fonctionner, notamment le consulat de New York. Très peu de pays ont reconnu les républiques soviétiques baltes. A ce titre, l’Union Soviétique n’a jamais pu récupérer les réserves d’or placées au Royaume-Uni, en France ou en Suisse, ni les bâtiments des légations. Dans le cas de l’Estonie, un gouvernement en Exil continuait à fonctionner en 1991, à Stockholm. Le 20 août 1991, c’est cette république qui est restaurée, après une occupation de 50 ans.
Le lendemain, les forces soviétiques s’emparent de la tour de la télévision, après une lutte héroïque des opérateurs, qui bloquèrent les ascenseurs et obligèrent les soldats à escalader la tour. La radio reste libre et continue de diffuser les informations. Alors que le coup d’état échoue à Moscou, les troupes se retirent à Tallinn, ouvrant la voie de la reconnaissance de l’indépendance.
Le 22 août, l’Islande est le premier pays à reconnaître l’Estonie. La république de Russie la reconnait le 24 août ; les Etats-Unis le 2 septembre. L’Union Soviétique attend le 6 septembre.
A la suite de l’indépendance, les pays restituèrent à la république les biens qu’ils avaient séquestré depuis la fin de la guerre. Les consulats et ambassades restés ouverts se rangèrent derrière la république restaurée. En Europe, les bâtiments des ambassades furent rendus. En France, le bâtiment ayant été détruit, une compensation fut attribuée. Le dernier Président du Gouvernement en Exil se rendit à Tallinn, pour adresser un discours au parlement et restituer au nouveau président les symboles de l’Etat.
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